« Gilets jaunes »: des milliers de manifestants, tensions près des Champs-Elysées

La quatrième journée de manifestations des « gilets jaunes », fortement encadrée par les forces de l’ordre, se déroule samedi dans une ambiance relativement calme malgré quelques tensions sur les Champs-Elysées.

Dans la capitale, la situation s’est tendue en milieu de matinée aux abords de la célèbre avenue, où les forces de l’ordre ont lancé les premiers gaz lacrymogènes contre des "gilets jaunes" venus manifester aux cris de "Macron démission".

Au total, 2.300 manifestants ont été recensés à 10H00 en Ile-de-France dont 2.100 à Paris, principalement près des Champs-Elysées, où les magasins sont barricadés derrière des plaques de bois, d’après la préfecture de police.

Vers 10H25, les forces de l’ordre ont tiré de nombreuses grenades lacrymogènes en direction des manifestants pour les faire reculer, dans une rue perpendiculaire aux Champs-Elysées, près de l’arc de Triomphe. Certains ont répliqué en lançant des projectiles et des pétards.

"Macron, on vient te chercher chez toi" chante une partie de la foule. "Il faut une augmentation immédiate du pouvoir d’achat. Avec 1.150 euros par mois, comment on s’en sort ?", dénonce Sylvia, drapeau bleu, blanc rouge autour du cou.

Partout dans l’Hexagone, des mesures de sécurité exceptionnelles ont été décrétées, notamment dans la capitale où les scènes de guérilla urbaine du week-end dernier ont stupéfié en France comme à l’étranger. 89.000 membres des forces de l’ordre sont mobilisés, dont 8.000 à Paris appuyés par 14 "VBRG", véhicules blindés à roue de la gendarmerie.

Le gouvernement, voyant que les mesures annoncées dans la semaine ne suffisait pas à calmer la colère, a multiplié les appels au calme ces derniers jours, et plusieurs figures de cette contestation née sur les réseaux sociaux ont appelé à défiler pacifiquement.

"Réveillez vous !"

Prenant les devants, les autorités ont renforcé les contrôles en amont: à la mi-journée 548 personnes avaient été interpellées à Paris, un nombre déjà supérieur au total des interpellations (412) effectuées dans la capitale samedi dernier.

Parmi elles, 272 ont été placées en garde à vue principalement car elles étaient en possession de marteau, de boules de pétanque, de pavés, de masques…

"Le mode d’intervention a changé: y aura plus de contrôles, plus d’interventions directes", avait reconnu dans la matinée le ministre de l’Intérieur, Christophe Castaner.

Plus de trois semaines après le lancement de ce mouvement pour le pouvoir d’achat né de la contestation de l’augmentation de la taxe sur les carburants, de nombreux "gilets jaunes" venaient pour la première fois manifester à Paris.

Plusieurs apostrophent les gendarmes boulevard Malesherbes : "Réveillez vous, venez avec nous, enfilez un gilet jaune, on est dans la même galère, vous devriez avoir honte !" crie l’un d’eux.

Quai de la Rapée, entre Bercy et gare de Lyon, les forces de l’ordre ont interpellé une trentaine de gilets jaunes, a constaté l’AFP.

Quelques centaines de "gilets jaunes" ont tenté d’envahir le périphérique parisien avant d’être repoussés dans la calme.

Soucieux d’éviter "des morts et des blessés", des représentants des "gilets jaunes libres", un collectif qui réclame au gouvernement plus de mesures pour aider ceux qui "arrivent de moins en moins à boucler leurs fins de mois", ont appelé à manifester pacifiquement, et pas à Paris pour éviter de se faire assimiler à des "casseurs".

Les grands magasins parisiens resteront fermés toute la journée, du jamais vu pour un samedi précédant les fêtes.

La tour Eiffel, le Louvre seront aussi fermés, tout comme de nombreux commerces et restaurants et 36 stations de métro.

Plusieurs pays européens ont conseillé la prudence à leurs ressortissants, voire d’éviter Paris ce week-end comme la Belgique.

"Ça nous gâche un peu notre séjour, tous les musées et les monuments sont fermés. On va juste se balader un peu et rentrer à l’hôtel !", regrette Marcia, touriste italienne de 25 ans venue passer le week-end à Paris.

Barrages filtrants

En régions, la situation semblait relativement calme même si le réseau routier et autoroutier français connaissait de nombreux points de perturbations dans la matinée avant des manifestations prévues dans l’après-midi dans plusieurs grandes villes.

L’autoroute A6 est coupée au niveau de Villefranche-sur-Saône dans le sens Paris-Lyon tout comme l’A10 à plusieurs niveaux.

Plus d’une quinzaine de personnes ont été interpellées à Grenoble, selon la préfecture de l’Isère. Quelques interpellations ont aussi eu lieu à la gare de Bordeaux.

Un millier de "gilets jaunes" ont défilé à Marseille. Sylvia Paloma, 70 ans, est venue défendre ses droits de retraitée: "Arriver à notre âge et demander l’aumône c’est pas possible !"

Les "gilets jaunes libres", qui se veulent "modérés", ont été reçus pendant une heure et demie vendredi soir à Matignon par Edouard Philippe.

"Le Premier ministre nous a écoutés et promis de porter nos revendications au président de la République. Maintenant nous attendons M. Macron. J’espère qu’il (…) prendra des décisions fortes", a déclaré à la sortie l’un d’eux, Christophe Chalençon.

Silencieux toute la semaine, Emmanuel Macron ne s’exprimera qu’en "début de semaine prochaine" sur la crise, selon le président de l’Assemblée nationale Richard Ferrand.

Les concessions du gouvernement, notamment l’annulation de l’augmentation de la taxe sur les carburants, semblent n’avoir eu aucun effet, si ce n’est d’avoir fragilisé le Premier ministre Édouard Philippe qui défendait une simple suspension avant d’être brutalement désavoué par l’Élysée.

Le gouvernement craint aussi une extension de la contestation à d’autres secteurs, notamment chez les agriculteurs et dans l’éducation.

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