En Tunisie, le pèlerinage juif de la Ghriba a retrouvé des couleurs

Les fidèles juifs sont venus par milliers en pèlerinage à la Ghriba, dans le sud de la Tunisie, confirmant un regain de fréquentation à la faveur d’une amélioration de la sécurité qui laisse également augurer d’une saison touristique record.

Ce pèlerinage, organisé chaque année au 33e jour de la Pâque juive, coïncidait cette année, pour la première fois depuis 1987, avec le mois sacré de jeûne musulman du ramadan.

"Ce pèlerinage juif en terre musulmane défraie la chronique, surtout en plein ramadan, au moment où la fébrilité et le fanatisme augmente", souligne l’historien tunisien Habib Kazdaghli.

Plusieurs milliers de pèlerins ont défilé mercredi et jeudi, une affluence en nette augmentation selon un responsable sécuritaire sur place et un organisateur. Plus de 5.000 personnes sont attendues au cours de la semaine.

Le pèlerinage renoue peu à peu avec sa fréquentation d’avant un attentat qui l’avait endeuillé en 2002, quand il attirait quelque 8.000 fidèles chaque année sur l’île de Djerba.

L’attentat revendiqué par Al Qaïda, qui avait coûté la vie à 21 personnes dont une majorité d’Allemands, avait donné un coup d’arrêt au pèlerinage.

Cette édition a été marquée par "le retour de juifs originaires de Tunisie dont certains n’étaient pas venu depuis 40 ou 50 ans", s’est félicité le ministre tunisien du Tourisme, René Trabelsi, un des anciens organisateurs du festival.

Ce voyagiste, fils du responsable de la synagogue de la Ghriba, est devenu en novembre le premier Tunisien de confession juive à occuper un poste de ministre depuis l’ère de Habib Bourguiba (1957-1987).

"Cela rentre dans la politique de redorer l’image de la Tunisie, seul pays arabe démocratique" et de "montrer que les touristes peuvent venir sereinement en Tunisie", souligne-t-il. "Réussir au niveau sécurité un pèlerinage juif d’un importance extraordinaire dans un pays arabe musulman, c’est un exploit".

Environ 600 personnes sont venues d’Israël, selon Sara Alfassi, l’un des accompagnatrices.

"Leur première inquiétude, c’est la sécurité", souligne-t-elle, "mais ils ont été rassurés par ce qu’ils ont entendu dire, notamment via les vidéos enthousiastes mises par des pèlerins l’an dernier sur Facebook".

Les fidèles ont prié et chanté en hébreu dans la synagogue baignée d’encens, et déposé des oeufs couverts de voeux dans une cavité au pied des arches saintes, avant de sortir en procession avec la "menara", un objet de culte couvert de foulards.

Cette procession faisait habituellement le tour des autres synagogues de l’île et des quartiers juifs, mais ces dernières années, les festivités se cantonnent aux alentours de la Ghriba pour des raisons sécuritaires.

Le pèlerinage fait partie de l’identité des Tunisiens de confession juive, qui ne sont plus que 1.500 à vivre en Tunisie, majoritairement à Djerba, contre 100.000 avant l’indépendance en 1956.

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